Les Églises chrétiennes prennent progressivement en compte la protection de l'environnement dans leurs positions depuis les années 1970.
En 1970, à l'occasion du 25e anniversaire de la FAO, le pape Paul VI déclarait :
« Mais la mise en œuvre de ces possibilités techniques à un rythme accéléré ne va pas sans retentir dangereusement sur l’équilibre de notre milieu naturel, et la détérioration progressive de ce qu’il est convenu d’appeler l’environnement risque, sous l’effet des retombées de la civilisation industrielle, de conduire à une véritable catastrophe écologique. Déjà nous voyons se vicier l’air que nous respirons, se dégrader l’eau que nous buvons, se polluer les rivières, les lacs, voire les océans, jusqu’à faire craindre une véritable « mort biologique » dans un avenir rapproché, si des mesures énergiques ne sont sans retard courageusement adoptées et sévèrement mises en œuvre. »
En 1971, dans la lettre apostolique Octogesima Adveniens (n° 21), le même Paul VI alertait déjà sur les risques liés à la pollution de l'environnement (Paul VI, un pionnier de l'écologie ?). Cette question était déjà abordée par le président Georges Pompidou dans son discours de Chcago en février 1970 (https://www.georges-pompidou.org/sites/default/files/2023-09/pompidou_oeuvres-choisies_2_chicago_0.pdf).
Lors de la Conférence des Nations Unies sur l’environnement humain à Stockholm, en 1972, le message envoyé par Paul VI a été lu à l'ouverture de la première séance, alertant déjà l'humanité pour qu'elle substitue le respect de la biosphère à la poussée aveugle du progrès matériel :
« Mais comment ignorer les déséquilibres provoqués dans la biosphère par l’exploitation désordonnée des réserves physiques de la planète, même dans le but de produire de l’utile, comme le gaspillage des ressources naturelles non renouvelables ; les pollutions du sol, de l’eau, de l’air et de l’espace avec leurs atteintes à la vie végétale et animale ? Tout ceci contribue à appauvrir et à détériorer l’environnement de l’homme au point, déclare-t-on, de menacer sa propre survie. Il faut enfin relever avec force le défi lancé à notre génération de dépasser les objectifs partiels et immédiats pour aménager aux hommes de demain une terre qui leur soit hospitalière. »
(Message du pape Paul VI à l'occasion de l'ouverture de la Conférence des Nations unies sur l'environnement sur le site du Vatican)
Le pape Jean-Paul II aura été un des grands penseurs chrétiens de notre temps en matière d'écologie. Depuis 1979, année où il a proclamé François d'Assise patron des écologistes, Jean-Paul II a écrit une vingtaine de textes sur l'écologie (cf Jean-Paul II, Les gémissements de la Création, vingt textes sur l'écologie, Parole et Silence, 2006).
L'encyclique Sollicitudo Rei Socialis abordait en 1988 le thème de l'environnement. Elle indique qu'il « faut tenir compte de la nature de chaque être et de ses liens mutuels dans un système ordonné, qui est le cosmos », qu'il faut prendre en considération « le caractère limité des ressources naturelles, certaines d'entre elles n'étant pas renouvelables », et prendre conscience des « conséquences qu'a un certain type de développement sur la qualité de la vie dans les zones industrialisées » (Encyclique Sollicitudo Rei Socialis, n° 34).
Le 1er septembre 1989, le patriarche œcuménique Dimitrios Ier de Constantinople a appelé à observer une Journée de la création le premier jour de septembre (début de l'année liturgique dans l'Église orthodoxe).
Jean-Paul II a aussi délivré un message fort en 1989 sur la responsabilité de tous devant l'importance des problèmes d'environnement. Il soulignait que la crise écologique est un problème moral.
Dès 1991, l'encyclique Centesimus annus alertait sur la responsabilité de l'homme en matière d'écologie :
« À côté du problème de la consommation, la ''question de l'écologie'', qui lui est étroitement connexe, inspire autant d'inquiétude. L'homme, saisi par le désir d'avoir et de jouir plus que par celui d'être et de croître, consomme d'une manière excessive et désordonnée les ressources de la terre et sa vie même. A l'origine de la destruction insensée du milieu naturel, il y a une erreur anthropologique, malheureusement répandue à notre époque. L'homme, qui découvre sa capacité de transformer et en un sens de créer le monde par son travail, oublie que cela s'accomplit toujours à partir du premier don originel des choses fait par Dieu. Il croit pouvoir disposer arbitrairement de la terre, en la soumettant sans mesure à sa volonté, comme si elle n'avait pas une forme et une destination antérieures que Dieu lui a données, que l'homme peut développer mais qu'il ne doit pas trahir. Au lieu de remplir son rôle de collaborateur de Dieu dans l'oeuvre de la création, l'homme se substitue à Dieu et, ainsi, finit par provoquer la révolte de la nature, plus tyrannisée que gouvernée par lui. » (Encyclique Centesimus annus , n° 37)
Le catéchisme de l'Église catholique publié en 1992 commente le septième commandement (« tu ne voleras pas ») de la façon suivante :
« Le septième commandement demande le respect de l’intégrité de la création. Les animaux, comme les plantes et les êtres inanimés, sont naturellement destinés au bien commun de l’humanité passée, présente et future (cf. Gn 1, 28-31). L’usage des ressources minérales, végétales et animales de l’univers, ne peut être détaché du respect des exigences morales. La domination accordée par le Créateur à l’homme sur les êtres inanimés et les autres vivants n’est pas absolue ; elle est mesurée par le souci de la qualité de la vie du prochain, y compris des générations à venir ; elle exige un respect religieux de l’intégrité de la création. » (cf Catéchisme de l'Eglise catholique, § 2415).
La doctrine sociale de l'Église comporte des recommandations sur la sauvegarde de l'environnement (cf Compendium de la doctrine sociale de l'Eglise, dixième chapitre, sauvegarder l'environnement). Elle comporte notamment le principe de la destination universelle des biens.
La commission sociale des évêques de France a également publié Le Respect de la Création (éd. du Centurion), qui est un opuscule d'une cinquantaine de pages publié le 17 janvier 2000 dans lequel ils appellent les chrétiens au civisme écologique et les rend responsables de la sauvegarde de la Création. Le christianisme est assez souvent accusé d'être responsable de la crise écologique, à cause du passage suivant de la Bible (Genèse 1, 28) :
« Emplissez la terre et soumettez la. Dominez sur les poissons de la mer, les oiseaux du ciel et tous les animaux. »
Dans ce document de la commission sociale des évêques de France, il est précisé :
« Dans un passé récent, les verbes « soumettre » et « dominer » ont été interprétés, dans certaines théologies du travail dans un sens trop dominateur, comme si l’homme était démiurge et jouissait de tous les pouvoirs… (§ 11) »
« Ainsi, l’homme n’est pas le maître absolu de la création. S’il a le droit d’en user, il n’a pas celui d’en abuser. Il doit en être l’intendant et le gestionnaire responsable. C’est une gérance qui lui est confiée afin qu’il la fasse fructifier et la rende habitable pour tous…(§ 12) »…
Le mouvement Pax Christi a créé une antenne « environnement et modes de vie », dont les travaux ont abouti à la publication, en juin 2005, en collaboration avec la commission sociale de l'épiscopat, d'un important ouvrage collectif : Planète vie, planète mort, l'heure des choix (Cerf).
Les 26 et 27 avril 2007, le Conseil pontifical Justice et Paix a organisé un séminaire sur le thème « Changements climatiques et développement ». Au sujet de la réflexion sur « les changements climatiques et le développement»", le pape Benoît XVI a lancé un appel au respect de la Création.
La pollution de l'environnement a été évoquée le 9 mars 2008 par Mgr Gianfranco Girotti, régent de la pénitencerie apostolique, comme une forme moderne du péché (cf Le Monde, 11 mars 2008, Le Vatican modernise la liste des actes considérés comme des péchés). Il a également insisté sur la dimension collective du péché, le péché social, alors que l'accent est traditionnellement mis sur la dimension individuelle.
Le 5 juin 2008, le Saint-Siège proposait un décalogue pour défendre l'environnement.
En 2009, l'encyclique Caritas in Veritate de Benoît XVI a abordé la question du respect de l'environnement :
« Le thème du développement est aussi aujourd’hui fortement lié aux devoirs qu’engendre le rapport de l’homme avec l’environnement naturel. Celui-ci a été donné à tous par Dieu et son usage représente pour nous une responsabilité à l’égard des pauvres, des générations à venir et de l’humanité tout entière. Si la nature, et en premier lieu l’être humain, sont considérés comme le fruit du hasard ou du déterminisme de l’évolution, la conscience de la responsabilité s’atténue dans les esprits. Dans la nature, le croyant reconnaît le merveilleux résultat de l’intervention créatrice de Dieu, dont l’homme peut user pour satisfaire ses besoins légitimes – matériels et immatériels – dans le respect des équilibres propres à la réalité créée. Si cette vision se perd, l’homme finit soit par considérer la nature comme une réalité intouchable, soit, au contraire, par en abuser. Ces deux attitudes ne sont pas conformes à la vision chrétienne de la nature, fruit de la création de Dieu. »
(Caritas in Veritate, chapitre IV, n° 48)
André Beauchamp, théologien et écologue canadien, a écrit, entre autres ouvrages, un livre en forme d'appel à l'Église catholique québécoise pour que celle-ci inscrive la question de l'environnement au cœur de ses préoccupations (cf André Bauchamp, environnement et Église, Fides, 2008).
Le 23 février 2009, Jean-Louis Borloo, ministre français chargé de l'écologie et du développement durable, a rencontré le cardinal Philippe Barbarin, archevêque de Lyon, en présence de plusieurs évêques, à la maison de la Conférence des évêques de France. Il a notamment invité l'Église à mieux communiquer sur la sauvegarde de la Création.
En juin 2015, quelques mois avant la Conférence de Paris sur le climat (COP 21), le pape François a publié l'encyclique Laudato si' « sur la sauvegarde de la maison commune», le document magistériel le plus important depuis le concile Vatican II selon le CERAS (voir ci-dessous).
Le 1er septembre 2016, à l'occasion de la deuxième journée mondiale de prière pour la sauvegarde de la Création, et dans le cadre du Jubilé de la miséricode, le pape François a proposé d'inclure la sauvegarde de la Création dans les oeuvres de miséricorde corporelles et spirituelles.
Consulter le livre suivant :
Thomas Michelet, Les papes et l'écologie, de Vatican II à Laudato si', 50 ans, 50 textes, de Gaudium et Spes à Laudato si' (1965-2015), préface du cardinal K.A. Turkson, président du Conseil pontifical Justice et paix